La législation du portage salarial : un cadre juridique en constante évolution

Le portage salarial s’est imposé comme une alternative intéressante pour les travailleurs indépendants souhaitant bénéficier de la sécurité et des avantages sociaux du statut de salarié. Face à cette réalité, la législation entourant le portage salarial a évolué ces dernières années pour mieux encadrer cette pratique en pleine expansion. Dans cet article, nous vous proposons un tour d’horizon complet de la législation relative au portage salarial, en mettant l’accent sur les évolutions récentes et leurs implications pour les acteurs concernés.

L’émergence d’un cadre juridique spécifique au portage salarial

Le portage salarial est apparu en France dans les années 1980 et a rapidement suscité l’intérêt des travailleurs indépendants et des entreprises. Toutefois, ce n’est qu’en 2008 que le législateur a reconnu le portage salarial comme une forme spécifique d’emploi, avec l’adoption de la loi de modernisation du marché du travail (loi n° 2008-596 du 25 juin 2008). Cette loi a permis d’établir les premières bases d’un cadre juridique dédié au portage salarial.

Cette reconnaissance législative s’est traduite par l’introduction d’un nouvel article (L.1251-64) dans le Code du travail, définissant le portage salarial comme « un ensemble de relations contractuelles organisées entre une entreprise de portage, une personne portée et des entreprises clientes comportant pour la personne portée le régime du salariat et la rémunération de sa prestation chez le client par l’entreprise de portage ». Cette définition a été complétée en 2010 par la loi n° 2010-594 du 3 juin 2010, qui a précisé les conditions d’exercice du portage salarial et les caractéristiques des contrats de travail conclus dans ce cadre.

La sécurisation du portage salarial par l’ordonnance du 2 avril 2015

En dépit de ces avancées législatives, le portage salarial souffrait encore d’un certain flou juridique et d’un manque de protection pour les travailleurs concernés. C’est dans ce contexte que l’ordonnance n° 2015-380 du 2 avril 2015 relative au portage salarial est venue sécuriser cette pratique en clarifiant ses contours et en renforçant les droits des travailleurs portés.

L’ordonnance du 2 avril 2015 a notamment introduit plusieurs dispositions visant à garantir une rémunération minimale pour les travailleurs portés, à encadrer la durée des missions et à prévoir des indemnités en cas de rupture anticipée du contrat. Elle a également instauré un droit à la formation professionnelle pour les travailleurs portés, ainsi qu’une garantie financière pour les entreprises de portage afin d’assurer le paiement des salaires et des charges sociales.

L’accord collectif national du 22 mars 2017 et ses apports

En 2017, un nouvel accord collectif national relatif au portage salarial a été signé par les partenaires sociaux (accord du 22 mars 2017). Cet accord est venu compléter et préciser le cadre juridique du portage salarial, en apportant des réponses à certaines questions laissées en suspens par l’ordonnance de 2015.

L’accord collectif national du 22 mars 2017 a notamment introduit des dispositions relatives au temps de travail des travailleurs portés, à la prise en compte de leur ancienneté et à la représentation de leurs intérêts auprès des instances représentatives du personnel. Il a également prévu la création d’une commission paritaire nationale chargée de veiller au respect des règles applicables au portage salarial et d’examiner les éventuels litiges entre les parties prenantes.

Le décret n° 2019-718 du 5 juillet 2019 : une nouvelle étape pour le portage salarial

Dernière évolution en date, le décret n° 2019-718 du 5 juillet 2019 relatif au contrat à durée déterminée conclu dans le cadre du portage salarial est venu apporter quelques modifications importantes aux règles encadrant cette pratique. Ce décret a notamment assoupli certaines conditions relatives à la durée minimale des missions et à la période d’essai des contrats conclus dans le cadre du portage salarial.

Ainsi, depuis l’entrée en vigueur de ce décret, la durée minimale des missions est fixée à 12 mois (contre 36 mois auparavant), avec la possibilité de la porter à 18 mois en cas de renouvellement. Par ailleurs, la période d’essai des contrats à durée déterminée dans le cadre du portage salarial est désormais alignée sur celle applicable aux contrats de travail classiques, soit une durée maximale de 2 mois pour les cadres et 1 mois pour les non-cadres.

Les perspectives d’évolution du cadre juridique du portage salarial

Le cadre juridique du portage salarial a connu un développement important ces dernières années, témoignant de la volonté des pouvoirs publics et des partenaires sociaux de mieux encadrer cette pratique en pleine croissance. Toutefois, certains aspects du portage salarial restent encore perfectibles, notamment en matière de dialogue social et d’accès aux droits sociaux pour les travailleurs portés.

Ainsi, il est possible que le législateur intervienne à nouveau dans les années à venir pour adapter et préciser les règles applicables au portage salarial. Dans cette perspective, il convient pour les acteurs concernés de se tenir informés des évolutions législatives et réglementaires afin d’anticiper leurs conséquences sur leurs pratiques professionnelles.

Le portage salarial offre une solution intéressante pour concilier l’autonomie du travail indépendant et la sécurité du statut de salarié. La législation entourant cette pratique a connu plusieurs évolutions ces dernières années, visant à clarifier et sécuriser le cadre juridique applicable. Toutefois, des ajustements pourraient encore être apportés pour mieux répondre aux besoins des travailleurs portés et des entreprises de portage.