La question de la transmission du patrimoine est une préoccupation majeure pour de nombreux couples. Dans certains cas, l’un des conjoints peut souhaiter déshériter l’autre, c’est-à-dire le priver de ses droits légaux sur la succession. Cet article vous informe sur les possibilités et les limites de cette démarche, ainsi que les étapes à suivre pour y parvenir.
Les raisons pouvant conduire à déshériter son conjoint
Plusieurs raisons peuvent motiver la volonté de déshériter son conjoint. Parmi elles, on peut citer :
- Une mésentente ou un conflit persistant au sein du couple ;
- Un souci d’équité envers les héritiers naturels ou légaux (enfants, petits-enfants) ;
- Le désir de protéger un enfant issu d’une précédente union ;
- La volonté d’allouer une part plus importante de l’héritage à une personne proche ou à une cause qui tient à cœur.
La réserve héréditaire et la quotité disponible
Pour bien comprendre les mécanismes liés à la succession et au fait de déshériter son conjoint, il convient d’abord d’évoquer deux notions essentielles : la réserve héréditaire et la quotité disponible.
La réservation héréditaire est une part du patrimoine du défunt qui est réservée par la loi à ses descendants directs (enfants, petits-enfants) et à son conjoint survivant. Cette part est incompressible et dépend du nombre d’héritiers directs. Par exemple, si le défunt a un enfant, la réserve héréditaire s’élève à la moitié de son patrimoine, si deux enfants, aux deux tiers du patrimoine et si trois enfants ou plus, aux trois quarts du patrimoine.
La quotité disponible représente la fraction du patrimoine qui peut être librement transmise par testament ou par donation entre vifs. Elle correspond au patrimoine restant après déduction de la réserve héréditaire. Ainsi, dans le cas où le défunt a un enfant, la quotité disponible s’élève à l’autre moitié de son patrimoine.
Les limites légales à la déshéritation du conjoint
En France, il n’est pas possible de déshériter totalement son conjoint. En effet, la loi protège les droits successoraux du conjoint survivant et prévoit que celui-ci bénéficie au minimum :
- D’une portion de la succession appelée usufruit temporaire, c’est-à-dire le droit d’utiliser et de percevoir les revenus des biens hérités sans en avoir pleinement la propriété ;
- Du droit au logement, qui permet au conjoint survivant de continuer à vivre dans le logement du couple, sous certaines conditions.
Il est donc impossible de priver totalement son conjoint de ses droits sur la succession. Toutefois, il est possible de réduire ces droits en agissant sur la quotité disponible.
Comment déshériter son conjoint dans les limites légales
Pour déshériter son conjoint dans les limites prévues par la loi, il faut :
- Rédiger un testament dans lequel vous exprimez votre volonté de transmettre la totalité ou une partie de votre quotité disponible à d’autres héritiers (enfants, petits-enfants, proches) ou à des organismes (associations, fondations) ;
- Faire appel à un notaire pour s’assurer que le testament respecte les règles en vigueur et que vos volontés seront bien appliquées lorsque vous ne serez plus là ;
- Informer votre conjoint de vos intentions et discuter avec lui des implications de cette décision pour lui et pour les autres héritiers.
Il est important de noter que si votre conjoint conteste le testament après votre décès, il aura la possibilité de saisir la justice pour faire valoir ses droits. C’est pourquoi il est essentiel de consulter un avocat spécialisé en droit des successions pour rédiger un testament solide et conforme à la loi.
D’autres solutions pour protéger ses héritiers
S’il n’est pas possible de déshériter totalement son conjoint en France, il existe d’autres solutions pour protéger vos héritiers et assurer une répartition équitable de votre patrimoine :
- La donation entre époux, qui permet de transmettre de son vivant une part plus importante de ses biens à son conjoint, en prévision de la succession ;
- Le changement de régime matrimonial, qui peut avoir un impact sur la répartition des biens entre les époux lors de la succession ;
- La souscription d’une assurance-vie, qui permet de constituer un capital destiné à être versé à un bénéficiaire désigné lors du décès de l’assuré.
Toutes ces solutions méritent d’être étudiées avec l’aide d’un avocat ou d’un notaire afin de choisir la meilleure stratégie en fonction de votre situation et de vos objectifs.
Dans tous les cas, il est primordial de se faire conseiller par un professionnel du droit pour s’assurer que vos volontés seront respectées et que les intérêts de vos héritiers seront bien protégés. La déshéritation partielle du conjoint est une décision importante qui doit être mûrement réfléchie et encadrée par la loi.